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Daily Archives: November 20, 2015

Le Phare d’Ar-Men 1960

20 Friday Nov 2015

Posted by S/O in Jean-Pierre Abraham, Lighthouse

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jean rené keruzoré, Jean-Pierre Abraham

Ar Men (“The Rock” in Breton), one of the best known lighthouses because of its isolated situation and the considerable difficulties its construction has presented (14 years were needed to build it !!), and the danger in evacuating its personnel.
Considered as one of the most challenging workplaces by the community of lighthouse keepers, it has been named “The Hell of Hells”.
It has been automated in 1990. It has been automated in 1990.
Extraits d’Armen de Jean-Pierre Abraham, 
 

J’ai toute la nuit devant moi. Il n’y aura pas de brume. L’horizon est clair, on voit tous les feux. Le vent est remonté au nord mais la houle demeure et le phare tremble par moments dans le bruit.Ma lampe est tombée tout à l’heure. Je n’ai pas vu qu’à chaque secousse elle se rapprochait un peu plus du bord de l’établi. Elle a basculé sur mes genoux puis sur le socle de fer. La chambre de veille a pris cet aspect fantastique que je n’aime pas. Les ombres et lumières tombant du feu tournant courent sur les boiseries. Certaines semblent venir d’en bas, par l’échelle de la salle des machines. L’armoire de cuivre et les roues dentées du mouvement d’horlogerie, les volutes de la rampe étincellent. Tout le reste est noir.

Les verres des lampes de rechange sont dans la chambre de Martin. Je ne ferai plus rien cette nuit. Cela ne va pas très bien. C’est ce que je voulais dire.

Il y a un grand oiseau qui tourne autour de la lanterne. Il glisse contre les vitres en battant des ailes, s’écarte, se fait prendre dans un des faisceaux de lumière, tourne avec lui, plonge à nouveau vers le feu. Il ne crie pas. Je suis sorti sur la galerie pour mieux le voir. C’est un oiseau brun, je ne connais pas son nom.Le feu de Sein est trop net, le mauvais temps va revenir.
Plus tard avec les vents de terre, nous aurons des milliers d’oiseaux. Et la brume.
(…) Il faudrait parler aussi de la lumière qui règne dans cet escalier, une lumière de cloître.
(…) La lumière de l’escalier est douce toute la journée. Elle entre par d’étroites lucarnes orientées à l’ouest, disposées régulièrement à chaque demi-étage. Le soir parfois tout s’illumine.La cuisine n’est jamais claire. On ne peut relever qu’à moitié le panneau de bronze qui protège la fenêtre en cas de mauvais temps.
Au-dessous, dans le magasin, le hublot de verre dépoli ne laisse pénétrer qu’un peu de lumière glauque.
En bas, il fait noir, entre les cuves à pétrole et les cuves à eau, dans la coursive d’entrée. Là se trouve la trappe de fer qui donne dans l’ancienne soute à charbon, maintenant noyée parait-il.Martin est appuyé contre le montant d’une vitre dans la lanterne, et regarde vaguement la mer, bouleversée à l’ouest. Le feu chante. La flamme du foyer, que l’on aperçoit sous le brûleur dans un miroir, est bleue et fixe. L’optique, immobile encore sous la housse blanche. Le soleil a disparu. Un peu de vent ronfle dans les ventilateurs de la coupole. On remonte le mouvement d’horlogerie. Le poids, qui repose au fond de son puits, dans le mur, à hauteur de la cuisine, heurte lourdement la paroi en se redressant, au premier tour de manivelle. Dans l’escalier les pierres s’assombrissent.Il faut que je dorme un peu avant minuit. Des questions vaines. Pourquoi la vue d’une lampe allumée en plein jour glace-t-elle le cœur ? Pourquoi suis-je toujours fasciné par le partage des ombres et des lumières ?

(…) Un court vent de nord faisait briller le flot montant. La mer glissait d’un seul bloc, sans bruit, et le ciel semblait la suivre. Seul, ce phare, dressé, inquiétant de loin j’imagine. Nous qui l’habitons nous sommes au secret. Je crois parfois participer à quelque chose de grave, sans comprendre.Nous entrons dans la période des vives eaux et l’on aperçoit, à basse mer, un morceau de la roche rouge sur laquelle le phare est bâti. Ar Men en breton signifie La Pierre. Qu’avait-elle de particulier cette roche pour qu’on la nomme ainsi, parmi les dizaines qui émergent sur la Basse-Froide ? J’aime ce nom.

Il faisait le même temps lorsque j’ai vu Armen pour la première fois. La mer était grise, comme toujours lorsqu’on navigue sur un bateau de guerre. J’ai cru reconnaître cet endroit. J’ai souhaité vivre dans ce phare. C’était la meilleurs façon pour ne plus le voir. Quand j’ai posé le pied, la première fois, sur ce débarcadère-jouet, je me suis cru chez moi. Mais de toute cette époque, déjà, je ne me souviens pas.

(…) Toute l’après-midi j’ai retrouvé cette impression de plein été. Le phare est enfoui dans la lumière. Je sens au-delà des énormes murs la pression de l’espace. La porte est barrée. Les doubles fenêtres sont closes dans les trois chambres. Je reste assis sur une marche de l’escalier, adossé à la chaux. Aucune ombre ne bouge. Je croyais jadis que les tempêtes étaient effrayantes. Dans l’enthousiasme j’envisageais très bien de m’envoler avec le phare. Mais la vraie peur apparaît quand la mer est trop calme. Comme si nous dérivions. Je voulais me rouler en boule dans un coin, non pas sur ma couchette, sur la pierre, dans un coin.

(…) Je n’avais pas envie d’allumer ma lampe. J’étais habillé du phare…Tout le phare vibrait légèrement, chaud dans le vent, éparpillant sa braise. La leçon des ténèbres est parfois très douce.

(…) Je m’allège, au cours du lent voyage de la Velleda à travers les écueils du pont de Sein, tandis que la silhouette du phare grandit à l’horizon. L’inutile se défait, s’effiloche dans le sillage. On arrive, je regarde de tous mes yeux. Henri réduit la vitesse, fait son furtif signe de croix, j’endosse le gilet de sauvetage, je cours rejoindre les matelots à l’avant. Des cris rauques ponctuent la manœuvre, enthousiastes ou moqueurs selon que le gardien, là-haut, a bien ou mal lancé la touline qui permettra d’effectuer le va-et-vient. On s’embrasse, je ris, je reçois de lourdes claques dans le dos, “Salut Jonas ! Amuse-toi bien dans ton château ! “, je suis tout neuf, content et inquiet comme un écolier à la rentrée des classes.
4h. Nuit interminable. Par instant la lumière qui tombe de la lanterne me semble toute rouge, comme s’il y avait un incendie de brûleur… J’ai entendu un choc très violent à la base du phare. Penché sur la rambarde, j’ai vu monter vers moi, avec une étonnante lueur, une gerbe d’écume, un peu grise dans la nuit, soudain éblouissante lorsqu’elle est parvenue au niveau de la lanterne et qu’un des trois faisceaux du feu l’a heurtée. J’ai habité un instant cette maison fantastique, qui s’est écroulée sur mes épaules. Je suis réveillé.

L’aube. Toutes les lueurs sont étrangères, mais le bruit, le chant à plusieurs voix du feu, peu à peu m’a rassuré.(…) La mer cogne sans répit maintenant. Les embruns crépitent sur la coupole. Les grandes vitres tremblent. C’est merveille qu’au milieu de tout ce vacarme le sifflement léger du feu demeure absolument perceptible. J’ai dû abandonner le fauteuil de quart, sous la pluie de mercure qui tombe de la cuve à chaque secousse.

20 décembre, 17h.
Patience. Choisir d’habiter près d’une lampe, c’est tout de même choisir la couleur de sa vie. Une lumière violente fait écran. Ici, entre les lueurs et les ombres on doit pouvoir avancer lentement. Peut-être vaudrait-il mieux flamber d’un coup, vivre en torche, se consumer dans un éclair de folie ?
Mais la folie est dehors qui hurle. il faut résister. Faire le poids. J’allume ma lampe. La lumière coule sur le table et d’objet en objet gagne ses positions. Des ombres se prennent à vivre intensément, comme un regard. La limite du cercle est imprécise. Il faudra y aller voir. Avancer les mains.
Je n’en finirai pas d’errer entre l’ombre et la nuit. C’est de la complaisance.

(…) Brume. Depuis deux jours. Nous ne parlons plus. Nous ne prenons plus nos repas ensemble. Martin a les yeux injectés de sang.Quatre heures. Tout est gris. L’aube ne changera rien. La porte de la galerie est ouverte, la fenêtre de la salle des machines aussi, pour assurer un courant d’air sur les moteurs brûlants. On ne peut rester dans la chambre de veille, à cause du froid, et du bruit. Aucun refuge. Quarante-cinq secondes, entre les coups de sirène, pour aller surveiller le feu, inutile. Lorsqu’on ne peut redescendre assez vite, on se ramasse en boule, là-haut, près de l’optique, on se bouche les oreilles de toutes ses forces. Quand le hurlement éclate, un violent sursaut traverse malgré tout le corps.

(…) Les oiseaux sont là. Plusieurs centaines. Le feu les attire, la sirène les épouvante. Fous, ils viennent se briser le crâne contre la vitre. Le muret extérieur, la galerie sont couverts de plumes et de sang. Il faut veiller désormais devant la porte ouverte : ils entreraient, ils envahisseraient la lanterne pour crever le manchon du feu.On entend un peu leurs cris. D’autres cris. Le phare bouge. La houle est plus forte.

Reflets de perle. L’aube. On ne voit pas le pied du phare. Le bruit de la sirène résonne sur l’eau comme dans une cathédrale.
Heures blanches. Dame blanche.
Poser ses mains sur les pierres. Rassurer. Renouer.
Différentes vannes freinent la ruée du pétrole sous pression vers le brûleur. Je les ouvre l’une après l’autre, lorsque l’aiguille du manomètre, au-dessus de chacune d’elles, a atteint le niveau prévu. Puis vient l’instant qui donnera le ton de la nuit. La dernière vanne ouverte, le pétrole se volatilise en passant au cœur du brûleur chauffé, jaillit en vapeur, en fumée blanche dans le manchon, une allumette l’enflamme. Le long sifflement peu à peu s’équilibre. Au fond du brûleur, très secrète, révélée par le miroir, apparaît la couronne de petites flammes bleues du foyer. Tout dépend de sa vigueur, de sa netteté, un grain de poussière dans l’éjecteur suffit à l’éteindre, le pétrole alors jaillit liquide, coule en flammes sur le socle, fait éclater les prismes.Il fait jour encore. Le squelette de l’optique se dessine confusément sur la housse. Le feu demeure caché. Personne ne sait. Nous gouvernons. Parfois dans le coeur vide, rincé de toute image, s’allume toute seule une autre lueur, comment le dire : la ferveur, peut-être. J’aime violemment cette vie, je veux toucher sa peau, sa vraie peau sans oripeaux. J’ai soudain l’impression que c’est très simple.
Je voudrais un jour, avec juste les mots, dire cette simplicité. Toutes les grimaces en moi n’auraient plus d’importance.
La dure liberté du vent. Nul n’est plus nu que lui.
La nuit. Les voûtes du monastère, les murs ronds de mon escalier.Aucun mortier ne lie ces pierres. Elles tiennent par leur propre poids. Les plus gros blocs, on les a longuement usés les uns contre les autres pour qu’ils s’épousent parfaitement.
Tout est simple. Un ordre profond, à peine visible, et la prodigieuse liberté du cœur. Aucune erreur, aucune hésitation apparente : l’esprit qui a conçu cela s’est totalement effacé derrière son œuvre.Et l’utilisation de la moindre pierre. La très longue patience alliée à l’inspiration du moment.
Midi. Le bruit de la vague et le silence, l’ombre épaulant la lumière, j’ai soudain l’impression que le phare est fondé sur leur équilibre. Et chaque geste le dresse un peu plus.
C’est fragile une rencontre d’oiseaux. Il faut soi-même être invisible là-dedans. et présent pour lancer la ronde.

Toutes les lueurs du jour, qui tournent et volent dans l’air léger de l’escalier, est-ce qu’elles ne se retrouvent pas au soir, dans la couronne de flammes secrètes du foyer ?A la lucarne près de laquelle je travaille aujourd’hui, on voit l’horizon partager exactement le ciel et la mer.

Le soir. Tout notre travail est pour l’horizon. Cette lente avalanche de la lumière vers le haut, les prismes la cassent durement, la renvoient au large.
Moi j’ai besoin de lumière, je suis affamé de lumière. Les murs, les cuivres. Par quelle roue d’un moulin secret devrai-je moi aussi passer ?
J’aurais voulu voir l’homme qui a décidé de cette construction. (Un illuminé, probablement. Mais on dit qu’il était humble et fort inquiet). Lorsqu’il a connu la nature de la roche, la surface utilisable, je suppose qu’il a su aussitôt quelles seraient la hauteur et la puissance du feu. Il brillait déjà là-haut, pour lui. Il n’y avait plus qu’à bâtir une tour pour le rejoindre. Chaque pierre a été choisie en fonction de cette nécessité. Se liant étroitement les unes aux autres est devenue unique.
Et je crois que la tour se défait un peu chaque jour dans la lumière, qu’elle est reconstruite au soir. Je pense au bruit des sabots dans l’escalier à l’heure de l’allumage.
26 avril.
Nous avons repeint en blanc les mât de pavillon, dérouillé la girouette, répandu du goudron chaud sur la coupole.
En bordure de la coupole, la seule décoration du phare : quatre têtes de lion, qui font office de gargouilles, rejetant l’eau par la gueule. Eau de pluie et eau de mer étroitement mêlées les jours de tempête.
J’ai repeint la longue potence au bout de laquelle passe le câble du va-et-vient. Martin aussi voulait le faire, mais on ne peut y travailler à deux. Nous avons tiré au sort. J’ai gagné. Martin dit : ” Ta chance te perdra”.
a cheval au bout de ce long bras noir, je voyais l’eau filer en dessous, j’avais l’impression de basculer lentement, comme lorsqu’on regarde, allongé dans l’herbe, des nuages passer au ciel, un jour de grand vent.
30 avril.
Nous avons terminé le blanc de la tour aujourd’hui. La face Nord est pénible à peindre. Les cuves à eau de la sirène occupent toute la largeur de la galerie de ce côté. ll faut faire de sérieuses acrobaties pour installer la chaise. Réussir à se poser sur le muretin, en arrivant en bas. Et il n’y a pas de soleil.Mais la mer scintillait un peu plus loin. Des mouettes planaient à notre hauteur, et se laissaient tout à coup tomber comme pierres dans l’eau.
La mer elle-même, la mer se perce de lames vives indéfiniment.
1er mai.
Il nous reste à peindre le nom du phare, tracé en grosses lettres noires sur la tour. Elles on un peu viré au gris au cours de l’hiver. J’ai fait le A, Martin le R, ce R dont il affirme, dans ses jours sombres, qu’il est de trop. Nous avons écrit le M ensemble.
 Jean-Pierre Abraham / ARMEN

 

 

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